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Cognizant Blog

Quand il s’agit de Santé, la préoccupation numéro un des concepteurs de solutions doit être l’amélioration des résultats cliniques et pas seulement de fournir une interface utilisateur estampillée « bien-être ».

Même si cela fait plusieurs années que le secteur de la Santé se fait l’écho de solutions « orientées patient », seul un faible pourcentage de ces applications peut vraiment se prévaloir d’une réelle valeur ajoutée. En effet, la plupart d'entre elles reposent avant tout sur une technologie à la mode ou sur des buzzwords, voire manquent de connaissances rigoureuses et structurées sur la maladie qu’elles cherchent à traiter : trop peu d’applications s’intéressent véritablement aux besoins de ceux qui prodiguent les soins.

Pour preuve : sur les cinq millions de téléchargements quotidiens observés parmi les 400 000 applications de santé et de bien-­être recensées sur les app stores d’Apple et Google, 95 % sont supprimées dans les 24 premières heures d’utilisation.

La raison derrière ces échecs ? L’incapacité de ces applications à répondre aux besoins…

  • … des patients, qui recherchent une réelle valeur ajoutée pour gérer leur maladie au quotidien, accéder simplement aux soins ou encore intégrer les traitements dans leurs vies et leurs routines quotidiennes, 
  • … des professionnels de santé, qui espèrent accéder facilement à des données et des informations clés pour leurs diagnostics,
  • … des aidants (familles et amis), qui souhaitent activement soutenir leurs proches en utilisant ces appareils et ces applications sans rencontrer de frein – par exemple en consultant les instructions dans leur propre langue,
  • … des pouvoirs publics, qui cherchent à obtenir la garantie clinique que la solution délivre bien les bénéfices escomptés et que les données du patient seront effectivement protégées.

Pour atteindre ces objectifs, la conception de solutions (applicatives) qui soient « orientées patient » nécessite donc une plus grande compréhension des maladies traitées et de la manière dont les parties prenantes du système de soin les gèrent. Au­delà, ce sont les facteurs de risque et les prédispositions susceptibles d’accélérer la maladie qui doivent être pris en compte. Enfin, il est impératif de comprendre quels sont les déterminants qui améliorent sensiblement les résultats, et ceci de façon cliniquement prouvée.

Voici donc les enseignements que nous avons retirés de nos travaux sur la façon de concevoir des solutions « orientées patients » plus performantes avec un panorama des innovations qu’elles peuvent apporter. Nous nous focalisons sur celles pouvant apporter un réel impact à la fois sur la vie des patients et sur tout l’écosystème de la santé.

Réussir son processus de conception

Une conception « orientée patient » efficace commence par une « phase de découverte » qui prend en compte de façon détaillée les remontées du terrain des patients et des professionnels de santé pour mieux comprendre leurs expériences et leurs besoins.

Un atelier de cocréation ou de design thinking peut ensuite être organisé en rassemblant des expertises cross-fonctionnelles qui traduiront les résultats de la recherche en solutions applicables. Après cela, une série de Sprints permet de concevoir et développer ces solutions de façon itérative, sur la base des retours réguliers des patients et des professionnels de santé.

Le facteur clé de succès au cœur de toute cette démarche sera, pour les designers, d’acquérir et de mobiliser des connaissances solides sur les symptômes et les effets de la maladie concernée, ainsi que sur la manière dont celle-ci est susceptible de se manifester (cf. diagramme ci-dessous).

DIAGRAMME « Méthodologie de Gestion des Maladies Chroniques »
Un schéma sur la méthodologie de gestion des maladies chroniques

Une méthodologie efficace en matière de gestion des maladies comporte ainsi :

  • Une gestion des schémas de risques – c’est­-à-dire la compréhension non seulement des symptômes apparents du patient mais aussi de son profil médical global et de ses comportements à risque. Pour une insuffisance cardiaque congestive par exemple, cela peut signifier qu'il faut tenir compte des niveaux de pression artérielle, des taux de cholestérol, des prédispositions génétiques et du mode de vie du patient, notamment s'il fume ou si son régime alimentaire est trop riche en sel.
  • Une modélisation des changements de comportements – c’est­à­dire des méthodologies qui peuvent aider les patients à surmonter leur résistance au changement. Par exemple en s’intéressant aux habitudes alimentaires quotidiennes du patient et en proposant des idées de repas simples et sains pour le cœur, appuyées sur ses habitudes, afin de l’inciter à manger plus sainement tout en respectant sa routine.
  • Une plongée dans l’analyse de la maladie – c’est­-à-dire la réunion de connaissances pointues sur les définitions cliniques de la maladie adressée et sur les traitements possibles. Cela peut sous-tendre un travail de recherche étendu, comme la curation de journaux académiques ou de publications, pour mettre en lumière les facteurs biologiques et physiologiques à l’œuvre dans la maladie et être ainsi prêt à développer des outils de mesures de ces facteurs (ou d’impact sur ceux-ci) à travers la solution digitale.
  • L’intégration clinique – c’est­-à-dire la garantie que toutes les parties prenantes accèdent effectivement à l’information qui leur est nécessaire et peuvent intervenir de manière adéquate au gré des évolutions observées sur le patient. Cela recouvre, par exemple, la possibilité pour un patient de contacter facilement son médecin ou de prévoir une téléconsultation si son état venait à se dégrader.
3 recommandations pour réussir ses solutions digitales pour la santé  
1) Réunir une grande diversité de compétences
 
Réussir à concevoir des applications innovantes sur la base de tous ces ingrédients passe forcément par des compétences que l’on ne trouve pas toujours dans les équipes de design traditionnelles. Parmi ces compétences rares, on peut citer les compétences en design de produit ou en digitalisation du parcours santé. Ajoutés à cela, les spécialistes en technologie médicale voire même en anthropologie médicale. Ces derniers peuvent faire toute la différence en permettant de mieux comprendre le ressenti des patients pendant leur maladie, mais aussi en sachant recueillir les connaissances des physiciens, des chercheurs ou des patients eux-mêmes : l’expérience terrain !
 

Un peu comme pour la méthode Agile appliquée au développement logiciel, l’équipe pourrait ici effectuer son travail de conception sous forme de Sprints itératifs, en développant des prototypes succincts que l’équipe pourrait ensuite rapidement affiner sur la base des retours utilisateurs. Une telle méthode pourrait permettre de passer du travail exploratoire initial à des proof of concepts éligibles à la phase de tests en seulement deux à trois mois.

2) Brainstormer librement

Pour atteindre ces objectifs, il est indispensable de créer un espace de discussion ouvert et sans jugement où toute idée est la bienvenue, même si celle-ci provient d’autres univers sectoriels ou requiert davantage d’efforts de mise en place. Les responsables des équipes devront non seulement affirmer ce principe de manière explicite mais également proposer des exercices qui laissent libre cours aux contributions les plus diverses. Parmi ceux-ci, on peut citer « Crazy Eights » (littéralement « Huit en folie ») pendant lequel chaque participant dispose de huit minutes pour imaginer huit idées innovantes pour la solution de santé digitale, sans tenir compte des contraintes de coûts ou de technologies.

Il est intéressant de constater que, dans les premières étapes du processus, les experts du monde médical et pharmacologique se montrent souvent réticents à accepter les méthodologies et exercices issus du design thinking – probablement en raison de leur culture de recherche clinique très structurée et des contraintes réglementaires auxquelles ils peuvent se heurter. Les spécialistes en digitalisation de la santé peuvent alors surmonter cette résistance initiale en expliquant comment ces exercices peuvent permettre d’identifier des besoins non satisfaits et aboutir à la conception de solutions créatives. Nous constatons d’ailleurs que ce scepticisme initial devant la liberté de ton du design thinking s’efface bien souvent pour laisser place à un enthousiasme de ces mêmes experts au fur et à mesure que les solutions créatives voient le jour et se construisent.

3) Passer à l'échelle via des composants digitaux réutilisables

Passer à l’échelle avec de grands volumes de patients et/ou la diversification de l’éventail de maladies adressées requiert la création de composants digitaux réutilisables. Parmi ceux­ci, on peut penser à : 

  • des éléments d’interface utilisateur communs entre plusieurs applications (destinées soit aux patients, soit aux médecins), 
  • des mécanismes standardisés de collecte et de stockage du consentement, 
  • des pipelines de collecte et de raffinement de données quand celles-ci sont issues de dispositifs médicaux connectés fréquemment utilisés,
  • des micro-services pour intégrer directement les dossiers médicaux électroniques…
La conception orientée patient à l’épreuve du terrain

Cognizant a éprouvé l’approche suivante avec un client d’envergure mondiale dans les services biopharmaceutiques. Nous avons conçu des solutions sur mesure pour aider les patients souffrant de deux maladies.

La première était une maladie inflammatoire de l’intestin (MII) provoquant de sévères accès de douleurs sur une longue durée et une envie fréquente, imprévisible de se rendre à la selle. La seconde était une affection aiguë, potentiellement mortelle, pouvant frapper les patients atteints de cancer. Dans les deux cas, nous avons muni les patients d’outils curatifs ou préventifs pour leur faciliter la vie.

1 ) Faciliter l'injection avec une vidéo pas à pas

Constatant les difficultés qu’ont les patients MII à s’administrer les piqûres pendant le traitement, l’équipe a développé une application vidéo calée sur le rythme des patients qui leur permet de revoir les instructions pour chaque étape (telle que le nettoyage du site d'injection) sans avoir à toucher l’ordinateur ou l’interface digitale – leur permettant ainsi de garder leurs mains propres et d’éviter d’éventuelles infections.

2) Localiser le point d'injection avec la réalité augmentée

Un brainstorming ouvert a aussi permis à l’équipe d’imaginer une application de réalité augmentée utilisant les données de la caméra du téléphone du patient pour faciliter la localisation du point d’injection. Un des patients nous a notamment remonté son intérêt pour l’une des fonctionnalités de cet outil, à savoir la conservation de la localisation du précédent point d’injection : « Il s’écoule huit semaines entre deux piqûres », nous a-t-il expliqué. « Donc parfois je n’ai aucune idée de l’endroit où j’avais piqué la dernière fois ».

3) Faciliter l'accès à des toilettes avec macaron digital

Pour faciliter l’accès aux toilettes des patients, l’équipe a imaginé un « passeport toilettes » digital que le patient pourrait montrer en toute discrétion dans les lieux publics et les magasins afin d’avoir accès à des toilettes qui ne seraient autrement pas ouvertes au public.

4) Aider à faire du préventif avec le diagnostic impartial de l'IA

Parmi les autres applications proposées, l’équipe a pensé à utiliser l’Intelligence Artificielle (IA) pour identifier les ingrédients composant un repas à partir des photos de chaque assiette, puis pour corréler ces informations avec les données de fréquentation des toilettes afin d’aider les patients à évaluer quels aliments provoquent plus directement leurs symptômes.

L’utilisation de l’IA pour corréler les aliments et les symptômes devrait permettre d’éliminer plus facilement les biais que l’on retrouve dans les déclarations des patients, estime l’un des médecins interrogés. « Si vous aimez un aliment, vous allez être moins enclin à l’associer à vos symptômes. Et l’inverse est également vrai : vous allez accuser davantage les aliments que vous n’aimez pas dans le déclenchement de vos symptômes. Avec l’usage de l’IA, impossible d’échapper à l’impartialité du diagnostic : vous savez exactement où se trouve le problème ».

5) Suivi de biomarqueurs et de consommation en eau

Notre client nous a demandé la même approche concernant la deuxième affection qui touchait les patients atteints de cancers, en s’appuyant sur les besoins des patients mais aussi des médecins. En travaillant avec eux, nous avons envisagé un système intégré d’évaluation des risques permettant aux médecins d’estimer rapidement et facilement la prédisposition d’un patient à cette maladie, en mesurant en continu des biomarqueurs comme le niveau de potassium afin de s’assurer que ces patients sont effectivement suivis sur la base de cet indicateur. Nous avons également proposé l’utilisation de bouteilles d’eau connectées pour aider les praticiens à suivre la consommation d’eau de leurs patients à risque et à vérifier que celle-ci est suffisante pour les hydrater.

Nos travaux de recherche sur le terrain, directement au contact des patients pour comprendre leurs besoins, ont généré dans l’équipe des niveaux de satisfaction et d’engagement au travail jamais égalés auparavant. Ce qui nous amène à affirmer qu’un design véritablement orienté vers le patient peut pousser la qualité de soin et l’avantage comparatif d’un acteur de la Santé à des niveaux auparavant impossibles à atteindre. Mais cela ne peut advenir sans un changement de mentalité dans l’organisation, qui doit encourager la culture de l’innovation « orientée patient » et une approche rigoureusement scientifique pour résoudre les problèmes rencontrés par les acteurs de l’écosystème Santé.

La focalisation sur le patient est un enjeu trop important pour s’attarder sur des considérations scientifiques ou même humaines. La conception et le développement « orientés patient » tels que décrits ci-dessus devraient permettre d’apporter en continu des solutions adaptées aux besoins réels des patients et de leur équipe de soin. Qui plus est, cela permet d’adresser les aspects préventifs en plus des aspects curatifs, redonner au patient le contrôle pour reprendre sa vie en main. Au-delà des questions pratiques, la dimension psychologique est primordiale pour participer au bien-être des patients.

Cet article a été écrit par Bryan Hill et Vidya Viswanathan, Digital Health & Innovation Leaders dans l’équipe Life Sciences de Cognizant avec l’adaptation de l’équipe France.

Pour en savoir plus, consultez la section Life Sciences de notre site ou contactez-nous.


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