Disponibilité et pertinence des données ESG, où en sommes-nous ? Au fur et à mesure que s’accélère la transition vers une économie bas carbone, de nouvelles préoccupations émergent autour de la pertinence des informations ESG remontées du terrain et sur la capacité du secteur financier à les prendre en compte pour transformer ses activités. Dans cet article, nous partageons les observations faites auprès des entreprises du secteur et les promesses que porte la technologie pour accélérer cette transition.
On le sait : l’impulsion donnée à la transition bas carbone dans le secteur financier est d’abord venue de l’Union européenne (UE) et des réglementations structurantes que celle-ci a promulguées. Le plan d’action de l’UE pour une finance durable (SFAP) lancé en 2018 a constitué la pierre angulaire des stratégies d’investissement durable observées en Europe – mais aussi, et cela témoigne de l’influence européenne, dans le reste du monde.
La réglementation, moteur de changement
Pour rappel, ce plan d’action créait un changement de paradigme majeur dans la réflexion financière en plaçant les considérations environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) au cœur même du système. Ses deux dispositions clé, le règlement sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers (SFDR, ou règlement Disclosure) et la taxonomie verte apportaient ensuite des éclairages aux entreprises du secteur quant aux mesures à mettre en œuvre :
- Le règlement Disclosure, publié en novembre 2020, créait ainsi de nouvelles obligations de transparence en matière de durabilité pour les acteurs du marché. Plus spécifiquement, il demandait aux organismes et consultants du secteur financier – notamment ceux offrant des services de conseils en investissement ou en produits d’assurance de type IBIP – de rendre compte par écrit des risques induits par leurs décisions d’investissement sur les facteurs de durabilité (les critères ESG). Cet exercice de transparence devait s’appliquer à la fois à l’échelle de l’entreprise mais aussi à l’échelle de chaque produit proposé.
- En parallèle, la Taxonomie européenne (dont la dernière version a été adoptée par la Commission le 2 février 2022) proposait une classification standardisée des activités économiques selon leur contribution à la transition environnementale – cette unification du système d’évaluation permettant de mettre en valeur les activités les plus vertueuses d’un point de vue environnemental et d’inviter les organismes du secteur financier à y flécher leurs investissements. Selon cette disposition, les entreprises concernées ont dû publier dès 2022 la part de leurs activités et de leurs investissements éligibles à la taxonomie (2023 pour les grandes entreprises).
Sous l’impulsion de ces nouvelles réglementations auxquelles elles doivent se conformer, les entreprises du secteur financier se mettent donc en ordre de marche pour créer de nouvelles propositions de valeur plus durables. Mais surtout, elles souhaitent insuffler la durabilité dans leurs activités plus traditionnelles.
… au diapason des attentes du marché
Car au-delà des exigences de l’Union européenne et de ses réglementations, c’est tout l’écosystème de clients, d’employés, d’investisseurs, et même de concurrents, qui leur intime ce changement : comprendre les attentes et propositions de ces derniers devrait permettre à ces entreprises d’identifier clairement les actions nécessaires pour assurer, d’une part, la conformité réglementaire, mais aussi la valorisation business de leurs enjeux de durabilité.
Mais dans ce parcours à la fois réglementaire et business (qui va de la vérification des exigences ESG à la cartographie des personnes, des sources et des systèmes susceptibles d’être mobilisés, en passant par l’alignement de toutes les parties prenantes), les entreprises se heurtent à un défi majeur qu’elles ont bien souvent du mal à relever : l’identification des données ESG pertinentes.
Principal frein : les données ESG
Au chapitre des nombreuses préoccupations qu’elles nous témoignent émergent ainsi des questions comme : quelles sont les données dont j’ai besoin pour remplir mes obligations en matière de transparence ou pour évaluer le risque climatique de mon portefeuille ?, est-ce que je dispose de suffisamment de données dans mes systèmes ou faut-il que j’aille chercher des données externes ?. Et, si oui : quelles sont alors les sources de données externes les plus pertinentes ? et est-ce que l’environnement dont elles proviennent est suffisamment riche en termes de segmentation clients, d’offres existantes, de process et d’exigences de reporting ? ...
Dans ce concert de questionnements, une autre difficulté vient se rajouter : même dans les entreprises où les données ESG sont disponibles en nombre, il reste très complexe d’identifier lesquelles témoignent d’une réelle corrélation avec l’activité ou l’impact environnemental de l’entreprise et lesquelles restent secondaires. Déterminer des seuils quantitatifs pertinents est ici un enjeu clé souvent non résolu par les entreprises, malgré une appréhension croissante de leur exposition aux risques ESG. Une recherche conduite par la Danske Bank et le Sustainability Accounting Standards Board (SASB) établissait ainsi une cartographie des incidences et montrait qu’il subsistait encore une grande méconnaissance sur le niveau d’impact et de corrélation de ces facteurs. Parmi les 100 entreprises scandinaves interrogées par l’étude, seules 17 % estimaient avoir une vision de l’intégralité des sujets affectant leur performance financière… ce qui signifie qu’il subsiste encore 83 % d’entreprises pour lesquelles le niveau d’exposition aux facteurs de durabilité reste un challenge.
La technologie comme promesse d’accélération
Ce challenge peut être adressé en partie par la technologie, à travers l’exploitation de données fiables, confidentielles et accessibles d’une part, et l’utilisation de l’intelligence artificielle et l’analytique d’autre part. L’objectif : construire une fondation data de confiance, accessible à tous et permettant une actualisation constante des données. C’est la promesse que Cognizant fait à ses clients quand elle les accompagne sur la modernisation de leurs technologies, sur la refonte de leurs processus et sur la transformation de leurs expériences, et cette philosophie s’applique de la même façon aux problématiques d’intégration ESG.
En effet, il est devenu évident pour le secteur financier que la croissance – et notamment la croissance décarbonée – passerait forcément par l’usage des technologies, comme en témoigne l’étude Green Rush: The Economic Imperative for Sustainability réalisée auprès de décideurs européens et nord-américains par l’équipe de recherche prospective de Cognizant. Celle-ci observait une adoption technologique rampante du secteur via des investissements en hausse sur l’internet des objets (IoT), l’IA, les réseaux électriques intelligents, les technologies Big Data et d'analytique ou encore la blockchain. Cette étude révélait également que les initiatives et les investissements réalisés sur le sujet de la durabilité avaient toutes les chances de générer des gains commerciaux pour l’entreprise – qu’il s’agisse d’augmentation des ventes, d’amélioration de l’image de marque ou de lancements de nouveaux produits et services en lien avec la durabilité.
Combiner données, IA et analytique pour intégrer l’ESG
En mixant l’apport de l’IA et de l’analytique à des données de qualité (celles issues d’une bonne fondation data), les entreprises du secteur financier peuvent espérer actionner toutes ces données ESG à l’échelle et tirer des informations pertinentes de ces vastes volumes de données, jusqu’à en faire des sources de décisions pour leurs business models durables. En d’autres termes : elles pourront appuyer leur stratégie globale d’intégration de l’ESG sur les données de l’entreprise et, à travers une transformation des process, des outils et des équipes, insuffler les principes de l’ESG dans les activités existantes ou dans la création de nouvelles opportunités business.
De plus, elles pourront répondre à un autre défi de taille : l’évolution constante du contexte réglementaire. Car, parmi les exigences réglementaires soulevées par le plan d’action de l’UE pour une finance durable, certaines viennent amender les législations existantes, comme MiFID II (Markets in Financial Instruments Directive) ou IDD (Insurance Distribution Directive). Cela signifie que les acteurs du secteur financier devront constamment revoir leurs procédures existantes pour identifier les lacunes dans les données et mettre en place des mesures de remédiation… avec le risque de faire émerger des questions de confidentialité, de sécurité ou d’éthique selon les outils de collecte utilisés.
Cognizant adresse régulièrement ces enjeux de responsabilité et de confidentialité des données avec ses clients quand elle traite de transformation ESG : cela permet non seulement d’intégrer l’ESG dans les processus existants mais aussi de prémunir les entreprises contre tous risques futurs liés à ces défis.
Accompagner la transition vers une économie bas-carbone
La transition vers une économie bas-carbone passe donc par une maîtrise plus concrète des données et des technologies. Mais aussi par une connaissance précise des réglementations communautaires et par une expertise sur les enjeux propres à chaque secteur.
Pour concevoir sa feuille de route zéro carbone ou ESG, l’entreprise moderne se doit de privilégier une approche globale avec la fixation d’objectifs transverse à son organisation ou plutôt son écosystème incluant l’ensemble de ses partenaires. Cela implique la traçabilité sur toute une chaîne de valeur et l’engagement de tous ses acteurs. L’entreprise moderne s’inspire des meilleures pratiques issues de benchmarks avec une analyse concurrentielle qui contribuent à son auto-évaluation. Elle a recours aux données et à l’analytique pour évaluer les KPIs pour dessiner des stratégies solides en matière d’intégration ESG. C’est toute l’entreprise qui peut ainsi passer dans l’économie de demain. Les sociétés de conseils et de services sont des accélérateurs de l’entreprise moderne avec la capitalisation sur l’expérience, la mutualisation des actions entre différents acteurs ou encore l’accès aux technologies de pointe éprouvées.
Pour toutes demandes spécifiques à la France, contactez Yanina Fedyunina, responsable de la communauté ESG banque et services financiers consulting pour la zone GGM chez Cognizant.
Article traduit en français d'après la version originale écrite par Noah Nzuki, Accelerating ESG integration and EU transition into a low carbon economy.